Avant la révélation du secret sorcier, tout était beaucoup plus simple. Si j'étais en possession d'un retourneur de temps, j'aurais fait en sorte d'éviter sa propagation aux yeux des moldus. Même si une chose pareille devait arriver un jour ou l'autre - surtout avec les moyens de communication moldus actuels - j'aurais préféré qu'elle n'arrive pas en mon temps. Aujourd'hui, je suis heureux de voir que cette histoire ne s'est pas soldée en une guerre atomique entre moldus et sorciers et que de bonnes choses ont résultées de cette révélation générale. Mais les deux dernières décennies n'ont pas été des plus paisibles.
J'ai 70 ans, alors mon histoire ne se résume pas qu'à quelques lignes. Installez-vous, ce sera long.Prémisse
Avant de parler de ma naissance, il faut refaire un point généalogique à mon propos. Mes origines ne sont pas uniquement mannoises. Elles remontent à deux générations, en Russie impériale lors de la révolution de 1917.
Mes grands-parents ont fui leur pays en 1921 afin d'échapper aux persécutions. Chez les sorciers non plus ce n'était pas une période très facile. Trop de violences, trop d'insécurité. Mon père, Ygor, l'aîné, n'avait quinze ans à cette époque. Il était hors de question pour eux de risquer de se faire assassiner ou de laisser leur fils se faire embarquer dans une sorte d'armée de fortune qui avait vu le jour en quelques années à peine.
Direction l'Angleterre, dans un coin paumé, là où on ne risquait pas de les retrouver.
C'est dans ces conditions que la famille Blavatsky avait trouvé refuge sur l'Île britannique de Man. Vie beaucoup plus tranquille que là-bas en Russie. L'intégration s'est faite progressivement. Trouver sa société sorcière sans se faire démasquer n'était pas évident, mais Ygor et les autres avaient finalement été envoyés à
Poudlard pour finir leur scolarité. C'est plus tard que mon père décida d'épouser une amie de la famille avec qui il s'était lié d'amitié sur l'Île. Une jeune fille
moldue répondant au nom de
Harriet Lewis. Elle était - à cette époque tout du moins - la seule à connaître le secret de mon père. Et c'est de cette union que je vis le jour, un matin de 4 Mai 1932.
CHAPITRE I : LE TEMPS DE L'INSOUCIANCE
Mon enfance fut tout à fait
banale. Peut-être même un peu trop. Je savais que lorsque viendraient mes onze ans j'allais enfin quitter cette Île perdue où rien ne se passait jamais, pour Poudlard. Je rêvais d'aventures, de découvrir le continent. Mais par dessus tout,
je rêvais de retrouver mes origines russes. Mon père et mes grands-parents n'y sont jamais retournés depuis leur exil. Presque toute leur famille a été décimée par des batailles, la famine ou des maladies, alors à quoi bon. Et leurs plaies étaient encore trop grandes pour trouver le courage d'y remettre les pieds. Lorsque je demandais à mon père à quoi ressemblait la vie là-bas, il me répondait en me décrivant un pays en guerre. J'ai donc essayé de faire parler mes grands-parents. À la fois
nostalgiques et horrifiés par leur pays d'origine, je n'ai eu que droit soit à des récits dignes de contes de fées soit à des discours semblables à des chefs de l'opposition à l'Empire. Quoi qu'il en soit, ma soif d'en connaître plus sur mes origines ne fut jamais assouvie lors de ma petite enfance.
L'année de ma rentrée à Poudlard, on me fit un présent. Une petite sœur était venue au monde.
Isadora. Ces onze années d'écart et cette distance géographique entre elle et moi une grande partie de l'année ne nous ont pas aidé à devenir très proches. Isadora est ma petite sœur et il est mon devoir de l'aimer et de la protéger quoi qu'il en advienne. Mais comment ? Lorsque la jeune blondinette avait eu l'âge de faire son entrée dans le monde extérieur (et j'entends par là, à Poudlard) j'étais déjà loin de ma famille et de l'île de Man, prêt à faire mon entrée dans le vrai monde, pour ma part. Notre relation n'a jamais été conflictuelle. Je dirais qu'elle était davantage...
inexistante. Et je ne pardonnerais jamais à mes parents pour ça. Sur une Île aussi inintéressante que le Man, un petit frère ou une petite sœur aurait été miraculeux ! Certes, c'est ce qu'il m'est arrivé. Mais
savoir que je n'aurais jamais une véritable complicité de frères et sœurs avec Isadora est la plus cruelle des tortures. Nous nous retrouvions quelques fois par années pour Noël et les vacances d'été. Mais le peu de temps passé ensembles et notre différence d'âge ne nous laissait pas nous rapprocher comme je l'aurais souhaité.
Le 1er septembre 1943, on m'a réparti dans la maison
Poufsouffle. Là, j'ai pu explorer les joies d'être avec d'autres enfants venant de milieux différents. J'ai développé une
curiosité insatiable pour l'histoire de mes congénères. D'où venaient-ils, quelles étaient leur cultures, leurs mœurs. Écossais, Irlandais, Gallois. Je n'arrivais pas à croire que certains venaient d'une aussi grande ville que Londres.
Même les bombardements me faisaient envie. Au moins ils avaient un peu d'action dans leur quotidien. J'avais tellement entendu parler de la révolution Russe et de l'action que cela impliquait que je me sentais légitime de poser des questions sur la guerre qui faisait rage sur le continent. Je crois que je ne m'en rendais pas compte, mais ceux que j'admiraient pour vivre dans de telles conditions m'enviaient à leur tour pour avoir une maison en sécurité, sur une Île où les Allemands ne prenaient pas la peine de venir bombarder.
Lorsque j'étais à Poudlard, de nombreux visages se retournaient au passage d'un
petit groupe de Serpentards plus vieux. Un
club élitiste composé uniquement des familles les plus "pures" et "nobles" du Royaume-Uni. Quelque chose de malsain, presque
machiavélique émanait de leur présence. Certains les admiraient et se voyaient probablement à leur côtés dans le miroir du Rised. Pour ma part, j'étais de ceux qui craignaient les pouvoirs ainsi que les intentions de ce petit groupe de sorciers. Si leur but était d'être les mages les plus puissants de leur génération et au vue de leurs familles respectives, j'avais l'impression que rien de bon ne pouvait résulter de leur rencontre. Parmi eux, le leader du groupe, celui que tout le monde connaissait et admirait, un certain
Jedusor.
Oswalt Prendergast faisait également partie du club. Il était un peu plus effacé, mais j'étais loin de me douter que ce sorcier - aux premiers abords inoffensif et plus raisonné que les autres - allait devenir celui que je redoute le plus aujourd'hui...
Ma scolarité secondaire achevée et mes ASPICS en poche (et la guerre moldue enfin finie), je décidais de consacrer ma vie à rendre ce monde un peu plus juste. Je m'étais trouvé un don dans ce qui était de persuader les autres en restant attachant. Mon esprit contradicteur, mon côté avocat du diable et mon éloquence s'étant aiguisés pendant mes sept années à Poudlard, c'est cette voie que tout naturellement je choisis. Mais avant d'
intégrer un cabinet d'avocat dans le département de la justice Magique à Londres, je décidais de réaliser mon rêve d'enfance:
voir la Russie de mes propres yeux. À l'aube des années 50, l'URSS faisait absolument tout pour être le pays le plus innovateur, le plus spectaculaire, le plus enviable du monde, dans une compétition avec les États-Unis. Mais ce que je vis n'était pas digne des contes de fées que me racontaient mes grands-parents, décédés depuis. Bien que le pays ne soit plus en révolte et que les innovations technologiques et industrielles émergeaient de partout,
je ne me sentais pas à ma place au sein de mon pays d'origine. Était-ce mon imagination de petit garçon qui avait falsifié la réalité ou le pays avait perdu de sa superbe en quelques décennies ? Un climat malsain d'amour inconditionnel et presque obligatoire pour le chef d'État et une
haine incommensurable envers les États-Unis et leurs alliés anglo-saxons ne me plaisaient pas du tout. Me
terrifiaient, même. Je devais me rendre à l'évidence,
la Russie ne serait que cela: le récit d'un souvenir de mes ancêtres dans un pays qui n'est plus.
La vie Londonienne avait ses avantages mais avait ses inconvénients aussi. J'avais rêvé toute mon enfance à d'autres horizons et je me persuadais que ma place n'était pas sur l'Île de Man. Mais plus les années passaient, plus je me sentais
vouloir revenir sur mon Île d'origine. C'était la seule Terre à laquelle j'étais réellement attaché, maintenant que j'avais été mis devant le fait accompli lors de mon voyage en URSS. Nous étions en
1962, j'avais 30 ans et le temps était venu pour moi de
fonder une famille. Je vivais depuis un certain nombre d'années dans la cohue Londonienne avec une jeune sorcière nommée Ophelia, l'amour de ma vie. Nous avions donc décidé de revenir faire notre vie sur mon Île d'enfance.
CHAPITRE II: LES PRENDERGAST
Après quelques années à essayer, nous avons fini par avoir une petite fille. Dès l'instant où j'ai tenu pour la première fois
Evanore dans mes bras, j'ai senti l'amour inconditionnel que je lui porterai toute ma vie. J'ai vu à travers elle mon absence envers ma petite sœur et je me suis juré de ne pas refaire la même erreur.
Je n'ai pas été assez présent pour
Isadora et je ne l'ai pas empêché de faire
d’irrévocables bêtises. Lorsqu'elle est entré à Poudlard, elle a fait la connaissance de ce
Prendergast, un nom que je ne connaissais que trop bien. Car il avait résonné dans mes oreilles maintes fois au département de la justice Magique. Des assassinats inexpliqués, un homme en fuite, un groupe de pro-sang-purs qui commençait à prendre forme. Tout cela était encore bien mystérieux à l'époque mais les spécialistes n'étaient pas dupes. Ce Jedusor et son petit club de Serpentards étaient très probablement derrière tout ça. Lestrange, Black, Malfoy, Yaksley. Et Prendergast, évidemment. J'étais loin de me douter que ma petite sœur se lie autant à celui qui était en réalité
le fils d'Oswald. Avocat, je me force à réserver mon jugement avant de connaitre une personne. Mais pour être honnête, je n'ai jamais réussi à accorder le bénéfice du doute à Austell. Isadora avait beau l'avoir choisi des années plus tard, il n'en venait pas moins d'une lignée douteuse et probablement incestueuse. La mentalité de cette famille n'a absolument rien à voir avec la notre et par ma négligence, Isadora est tombée dans leurs filets. J'ignore ce qui a pu pousser ma sœur à se marier et à engendrer les descendants de cette lignée. Un sortilège, l'influence ? Ou tout simplement
l'amour ? Ils semblaient si amoureux l'un de l'autre... Il y a trop de choses que j'ignore, et
le mystère qui plane autour de leur mort me rend fou de rage.
Même si aucune preuve concrète n'accusait Oswald de faire partie des Mangemorts, je restais
absolument convaincu qu'il avait gardé les liens forts avec
lord Voldemort. Comment un homme descendant d'une lignée aussi intéressante pour l'armée de sang-purs que voulait composer le Mage Noir, pouvait rester à l'écart de la bataille ? Si Prendregast avait renoncé à adhérer à l'idéologie meurtrière des Mangemorts, Jedusor se serait débarrassé de lui, cela ne fait aucun doute. Pour moi, cette famille, bien que ma sœur en fasse désormais partie, n'était
pas fréquentable. Cela me déchirait le cœur de l'accueillir de cette manière lorsqu'elle nous rendait visite à la maison avec ses enfants. Je m'en voulais terriblement d'avoir laissé Isadora se lier aux Prendergast, mais elle avait fait son choix. Elle était
une cause perdue et je voulais protéger ma fille unique du même destin, voilà tout. C'est pour cette raison que je leur faisais comprendre qu'ils n'étaient
plus les bienvenus sur l'Île de Man. J'aurais tellement aimé que tout se passe autrement, qu'Austell ne porte pas le nom de famille qui pèse maintenant sur ma petite sœur,
j'aurais tellement aimé avoir une famille normale.
CHAPITRE III: LE SECRET MAGIQUE
Evanore était à Poudlard depuis cinq ans lorsque la nouvelle s'était répandue. Le Seigneur des Ténèbres avait été vaincu par un garçon d'à peine un an en Angleterre.
à suivre