«
Nous Sommes Frères. »
Des mots qui
résonnent, des mots qui
raisonnent. Et de ces maux, ils avaient caressé l’impossible. Et de ces mots, ils avaient bercé les esprits les plus dociles et les plus naïfs. Comment avaient-ils simplement pu croire qu’une cohabitation pourrait perdurer jusqu’à la fin des temps, alors que la nature même de l’humain consistait à éliminer la concurrence. Parce qu’à trop chercher les démons, ils n’avaient jamais réalisé que la réelle quête qui les définirait en tant qu’hommes, était la neutralité. Et c’est ainsi que la plus ironique des forces de l’être subsistait, pour parfaire le portrait poétique et honorifique d’un chaos qu’ils avaient toujours instauré :
s’unir dans l’adversité pour faire triompher l’injustice des statuts sociaux. Et dans leurs mensonges ils avaient toujours trouvé la justification qui pouvait les faire pleurer les pauvres âmes qui avaient malheureusement quitté ce monde sans rien demander. Parce que cette guerre était imminente. Parce que cette guerre leur était profitable.
Acculturation
Ethnocentrisme et ethnocide
Génocide.Mais ils n’avaient pas peur.
Parce que les sorciers avaient toujours été un peuple fort qui combattrait pour l’égalité et l’amnistie. Mais il n’y avait rien à craindre.
Parce qu’ils trouveraient un moyen de vivre dans l’harmonie sans brimer les droits d’autrui. Elle avait peur. Elle avait toujours craint.
« Que celui qui combat les monstres prenne garde dans sa guerre. À force de plonger trop longtemps votre regard dans l'abime, c'est l'abime qui entre en vous. »
Friedrich Nietzsche
Juillet 1984
Adrasteia : 5 ans / Septimus & Octavius : 3 ans
On pouvait l’entendre, de ses petits pieds qui tambourinaient le bois du sol à une vitesse fulgurante. De ses souffles irréguliers qui secouaient tout son être sous cette crainte qui lui perçait l’âme d’une lame affutée. Elle avait peur, elle avait toujours eu peur. Elle avait eu peur quand sa mère lui avait décrit en détail les gestes qu’elle devrait poser. Elle avait eu peur lorsqu’elle les avaient vu, hauts comme trois pommes, à ricaner en faisant rouler les petites voitures sur le plancher. Elle avait eu peur lorsqu’elle avait posé ses mains contre leurs petits corps pour les pousser avec force, fermant ses paupières alors qu’elle écoutait avec regret les bruits qu’ils produisaient, rebondissant lourdement contre chaque marche de l’escalier.
Elle avait eu peur. Quand la voix de sa belle-mère avait percé les murs du son. Quand la voix de son père avait hurlé sa surprise. Et ses pieds avaient résonnés, parcourant le chemin vers la sécurité des appartements de sa mère qui l’accueillait d’applaudissements grossiers, tournant sur elle-même dans une valse qui s’harmonisait parfaitement aux mélodies qu’elle seule pouvait entendre.
«
Elle l’a fait ! Elle l’a fait, ma petite poupée aux cheveux d’ébène. Elle l’a faiiiit, toute magnifique et resplendissante ma petite poupée macabre. »
Les chants de sa mère faisaient pulser ardemment son petit cœur de peur, ses petits pas qui ne cessaient de résonner au gré de sa course, ouvrant les portes de la penderie, la fillette Raventhrone se faufilait entre les robes de sa mère, recroquevillant ses genoux contre son torse qui se gonflait d’essoufflement. Sa mère haussa les sourcils, s’approchant de sa cachette, glissant son index contre le bout de ses lèvres souriantes. «
Shhhhhhh » lui avait-elle intimé avant de refermer les portes, la fillette hochant la tête, posant ses mains contre sa propre bouche. Le silence est d’or, le silence de mort. Elle devait être forte, pour une mère malade qui berçait la lune de ses comptines. Elle devait être forte, pour une mère haineuse qui se perdait dans ses prières. Parce que papa avait des mains trop fortes pour comprendre les gestes désespérés d’une enfant qui ne comprenait pas. Et de ses mains trop fortes, il avait ouvert la porte de la chambre. Et de sa voix trop dure, il avait hurlé des paroles qu’il ne pensait pas à sa mère qui dansait toujours et encore sa peine. C’est tout ce qu’elle faisait sa mère, danser sa peine, simplement parce que sa tête souffrait trop pour réaliser l’étendu de ses méfaits. Les mains trop fortes de son père entouraient les poignets de sa mère trop triste. «
Petite poupée macabre, petite poupée d’ébène. Qu’elle est belle ta fille, tu sais combien qu’elle est jolie ta petite poupée sinistre. Qu’elle est jolie, jolie … qu’elle est jolie. » avait chantée une nouvelle fois sa mère. La fillette posa ses mains contre ses oreilles, étouffant du mieux qu’elle pouvait les bruits qui alourdissaient la pièce. Les rires, les cris, les chants, les menaces. «
Où est-elle ? Valeriya, dis-moi où elle est. » - Les questions, les réponses, les persécutions. Entre les lattes de la porte, elle pouvait observer sa mère qui se laissait tomber contre le sol, ricanant, ricaneuse. Les vibrations des chocs se faisaient sentir sur le sol jusqu’à elle, chaque fois que Valeriya percutait le sol de sa tête, murmurant des inepties qui ne voulaient rien dire. Son père quitta finalement la chambre, laissant cette femme avec qui il avait été marié autrefois, s’infliger des blessures, parce qu’elle était trop triste.
Elle avait peur. D’un papa aux mains trop fortes. D’une maman aux demandes trop tristes. D’une belle-maman aux paroles trop dures. De demi-frères aux sourires trop purs. D’elle au cœur trop lourd.
C’était trop. Trop, beaucoup trop, tellement trop, elle était trop, tout était trop.
Elle avait trop peur.
« La peur est la plus terrible des passions, parce qu'elle fait ses premiers efforts contre la raison, elle paralyse le cœur et l'esprit. »
Antoine de Rivarol
Juin 1985
Adrasteia & Stanislas : 6 ans / Septimus & Octavius : 3 ans
«
Tu crois qu’ils vont arrêter de vomir bientôt ? »
«
Je sais pas. Je comprends pas j’ai mangé des fruits pareils hier au dessert. Papa va être fâché. »
«
On fait quoi ? »
«
On va chercher Babouchka … mais avant … »
«
Oui, on les caches dans les buissons. T’façon ils font dodo maintenant, ça peut pas être pire. Ça doit être bon signe, moi je dors beaucoup quand je suis malade. On guérit quand on dort et qu’on est malade. »
«
Tu as raison … tu as toujours raison. »
Elle pressa ses doigts contre sa main, hochant la tête avant de s’approcher d’un Septimus aux lèvres pâles. D’un geste naturel, ils avaient attrapé ses pieds, tirant de toutes leurs forces pour traîner ce petit corps inerte qui se salissait par la terre humide. Bouger les corps des jumeaux avait été relativement facile. Cacher ses demi-frères avait été un jeu d’enfant, un nouveau niveau de la cachette, sauf que cette version visait de nouveaux buts, de nouveaux idéaux. Papa jouait, mais il ne savait pas. Septimus et Octavius jouaient mais ils ne savaient pas. Adrasteia et Stanislas jouaient et c’était la seule chose qui comptait. D’un pas lent, ils s’étaient approchés de la fontaine, nettoyant méticuleusement la terre qui tatouait leurs fautes sur la peau de leurs mains. Parce que personne ne devait savoir, parce que personne ne saurait. Le garçon attrapa machinalement sa main perlée d’eau apocryphe avant de l’intimer à le suivre. Ils avaient poussé la porte de la cuisine, observant pendant quelques secondes sa grand-mère qui courait dans tous les sens, s’adonnant corps et âme à préparer le repas du soir. Son père avait longtemps tenté de lui faire comprendre qu’ils avaient des elfes pour faire ce genre de tâches, mais sa grand-mère était têtue. Elle l’avait même chassé une fois, à coup de cuillère de bois en profanant des discours dramatique. La fillette jeta un regard furtif à son ami, resserrant ses doigts contre les siens comme pour se donner du courage. Ensemble jusqu’au bout, ensemble jusqu’à la fin des temps. À l’unisson ils s’étaient élancés dans une course rapide, leurs souliers souillant le sol de cette terre qu’ils avaient piétinée toute la journée. «
BABOU, BABOU!! » avait-elle crié, l’inquiétude tirant les traits de son visage. Sa grand-mère s’arrêta brusquement, son regard se posant sur les deux enfants qui courraient jusqu’à elle. «
LES JUMEAUX!! » avait-elle enchaînée. Sa grand-mère leva une main pour les inciter à se calmer. À bout de souffle, ils avaient laissé la vieille femme les accueillir dans une étreinte chaleureuse et rassurante. «
Mais pourquoi êtes-vous autant agités ! »
«
On jouait pis ils se sont mis à courir. Deux minutes pas plus ! »
«
On les trouvait plus, pis on a entendu des bruits bizarres. »
«
Ils ont vomi partout. Sur leurs vêtements, dans leurs cheveux. Ils sont dans des buissons et font dodo! »
La vieille femme haussa les sourcils tant la stupeur se peignait sur son visage. Elle se redressa, posant une main contre sa bouche, faisant les cent pas. Son cœur battait si vite, la peur revenait, toujours et encore la peur qui dominait. La femme s’approcha d’eux d’un pas précipité, s’agenouillant difficilement. «
Allez dans la salle de bain de ta chambre et préparez vos beaux habits pour le souper de ce soir. Quand vous serez prêts, aller pratiquer votre piano dans le salon des invités. Je vais chercher les jumeaux. Pas un mot … compris ? » avait-elle murmuré aux enfants qui hochaient la tête avant de disparaître dans le couloir principal.
« Ils ne demandaient rien d'autre que d'être heureux ensemble. Même pas heureux d'ailleurs, ils n'étaient plus si exigeants. D'être ensemble, c'est tout. »
Anna Gavalda
mai 1988
Adrasteia : 9 ans / Septimus & Octavius : 5 ans
Ses doigts se faisaient précis et délicats, rapides et enthousiasmes, dégringolant sur les touches d’ivoires qui se présentaient devant elle. Elle les connaissait par cœur, chaque pression, chaque détonation, chaque écart et chaque liaison. De ses doigts elle composait, rapidement et grossièrement avant de s’arrêter brusquement. Elle hoqueta, sautillant sur son petit banc avant de se redresser et de courir vers sa mère qui se tenait droite, les traits de son visage étaient emprunt d’une légèreté nouvelle, pressant ses lèvres alors qu’elle observait sa fille silencieusement. «
Tu as vu maman ? Comment mes cheveux sont longs ? Viktoriya voulait que l’on les coupe mais j’ai pas voulu. Je les voulais longs, comme les tiens. » avait-elle proclamé avec rapidité, tournant joyeusement sur elle-même pour lui montrer ses longs cheveux. «
Et puis on a aussi un grand jardin, parce que tu aimes les fleurs hein maman ? C’était le jardin que tu voulais hein maman ? J’y suis allée tous les jours pendant que tu étais à l’hôpital. Avec Babouchka, on a plantées de jolies neriums pour toi maman, après deux ans, elles sont si grandes. Tu les aimerais maman, hein tu aimes les neriums maman !? On pourrait y aller maintenant si tu veux ? » avait-elle poursuivit sans trop laisser de temps à sa mère de répondre à quoi que ce soit. Au fond, ce n’était pas pour mal faire, au fond, ce n’était que parce qu’elle débordait d’une joie explosive.
Elle l’avait attendue. Pendant deux longues années, à jouer contre le parquet d’une chambre silencieuse. Elle l’avait attendue, à dessiner des formes abstraites dans la buée des vitres de la fenêtre quand le ciel se fendait d’éclairs et de tonnerres. Elle l’avait attendue, à étouffer ses pleurs et ses cris, lorsque grand-mère avait quitté son monde. 104 semaines à brosser les cheveux de ses poupées, bien assises sur le petit banc d’une commode qui ternissait sous la poussière. 730 jours à chercher son parfum sur des vêtements bien rangés dans ses commodes, à protéger les intrus qui oseraient fouler le sol de cette cage dorée. «
Maman … aimerait dormir Adrasteia. Je suis si fatiguée … » - Elle avait une si jolie voix sa mère, elle avait de si jolis yeux exténués sa mère. La fillette secoua sa tête avec vivacité, fronçant ses sourcils avec colère. «
Mais MAMAN! Tu viens d’arriver et moi je veux te montrer. Je veux … J’ai beaucoup de jolies robes que tu n’as pas encore vu. Et puis je voudrais jouer aussi. C’est bientôt l’heure du thé avec la princesse sorina! » avait-elle rétorquée d’une voix qui se faisait lourde d’une peine teintée de frustration. Sa mère secoua sa tête également, glissant ses mains contre son visage dans un soupire désespéré. «
Adrasteia. Plus tard j’ai dis. »
Elle l’avait attendue, pendant deux longues années et tout ce qu’elles faisaient depuis trois jours n’était que dormir et encore dormir. Dormir parce que maman pleurait. Dormir parce que maman avait la tête qui tournait. Dormir parce que maman était épuisée. Dormir parce que maman n’avait pas faim. Dormir parce que maman ne voulait pas voir papa. Dormir, dormir, dormir, dormir. La fillette frappa son petit pied contre le sol, poussant un hurlement qui vibrait depuis les tréfonds de son âme. Elle n’iraient pas dormir, elles sortiraient et profiteraient du peu de soleil pour admirer les couleurs qui ravageaient le jardin. Elle agitait les bras, hurlant un peu plus fort alors qu’elle regardait sa mère poser ses mains contre ses oreilles, son petit corps heurtant le sol pour accentuer cette crise monumentale. Sa mère s’approcha d’elle au pas de course, attrapant la brunette par le poignet pour la faire glisser contre le sol jusqu’à cette penderie qu’elle connaissait si bien. La peur revenait, la crainte s’imposait, faisant de la poupée sinistre une muette accomplie. Et de sa si jolie voix, Valeriya perçait les symphonies du silence à son tour, refermant les portes de cette forteresse qui avait toujours été sienne. Son front se percutait frénétiquement contre les dites portes pour s’harmoniser au timbre de ses cris pendant de si longues secondes. Un lourd silence s’incrusta finalement.
17 520 heures à prier le ciel .... et elles n’iraient pas voir les jardins.
« C'est un grand effet de la bonté divine qu'une mère s'attache à son enfant en raison des peines qu'elle se donne pour lui.»
Alfred Auguste Pilavoine
Décembre 1994
Adrasteia : 16 ans / Stanislas : 15 ans
Septimus & Octavius : 11 ans
«
Pourquoi tu as dis au professeur que tu passais Noël à Poudlard ? »
Elle poussa un long soupire exaspéré, haussant les épaules alors qu’elle se faufilait entre les présentoirs de vêtements. S’ils avaient profité de cette dernière sortie à Pré-au-Lard pour faire quelques emplettes pour le temps des fêtes, Adrasteia avait insisté pour qu’ils terminent par la boutique du Gaichiffon, faisant fi des remarques du plus grand quant à la qualité des vêtements qui s’y trouvaient. De toute façon, ils n’avaient fait que ça de toute la journée, s’obstiner pour un oui ou pour un non, pour un regard supposément dédaigneux ou parce qu’il marchait beaucoup trop vite pour elle. Il était le problème, il était clairement le problème. Il faisait tout ce qui était en son possible pour lui ruiner une si belle journée, comme ce moment où il avait intentionnellement renversé son verre de bière-au-beurre lorsqu’ils avaient croisé un de ses amis à lui et qu’ils s’étaient serré la main. Oh mais il essayait de lui faire croire que ce n’était qu’un accident, mais elle savait qu’il avait fait exprès ! Pourquoi aurait-il éclaté de rire s’il n’avait pas complètement prémédité ses gestes ? Pourquoi avait-il arrêté pour parler avec ce garçon qu’il voyait tous les jours alors qu’il faisait froid et que la neige tombait depuis plusieurs heures !
«
Moya Kukla ? » avait-il dit sur un ton gentiment moqueur suite à son silence. La brune se retourna brusquement, fronçant les sourcils alors qu’elle abordait un air des plus agacé. «
Mais arrête Stanislas ! Pourquoi tu m’agresse comme ça aujourd’hui ! » son ton était légèrement plus aigue qu’à l’habitude, irrité par la mauvaise journée qu’elle avait passé et ce mal de ventre qui persistait depuis la nuit dernière. Elle claqua le bout de sa langue contre son palais, reportant son regard sur quelques robes de célébration qui avaient été judicieusement disposé pour la période des fêtes. Elle attrapa la première qui se trouvait devant elle, poussant un nouveau soupire alors qu’il lui tournait une nouvelle fois autours. Il était furieux, elle le savait bien … pourtant il semblait se faire violence. Et de ses éternelles habitudes il aborda un air taquin, simplement parce qu’il la connaissait beaucoup trop bien pour sous-estimer ses capacités à pouvoir se faire pardonner d’un seul et unique sourire. Elle fronça les sourcils, se frayant un chemin vers la cabine d’essayage sans lui porter un seul regard. Il avait raison, il avait toujours raison et c’était exactement pourquoi elle faisait de son mieux pour éviter de le regarder. Elle voulait être en colère contre lui, parce qu’il le méritait n’est-ce pas ? Elle adressa un sourire courtois à la vendeuse qui lui ouvrait une petite porte pour essayer cette robe qu’elle n’aimait même pas. Peut-être au fond que ce n’était que pour le contrarier … peut-être. «
De toute façon, on pourrait facilement trouver une robe qui te sied mieux dans une autre boutique ! Tu sais parfaitement que tu ne porteras jamais celle-ci … Adrasteia … mais parle-moi. Pourquoi es-tu de si mauvaise humeur aujourd’hui ! Ne me dis pas que tu as t’es premières … les gens disent que vous les femmes vous êtes de vrais monstres quand vous … » avait-il déblatéré, observant le plafond comme si c’était la seule et unique chose qui était assez intéressante dans cette boutique. La porte de la salle d’essayage s’ouvrit abruptement, laissant à peine le temps au plus grand de comprendre pourquoi il se faisait tirer ainsi par son foulard. La brune referma la porte, dans un claquement sonore, observant le garçon avec de grands yeux. Une première larme roula sur sa joue, laissant Stanislas sans voix alors qu’il l’observait sangloter soudainement. «
Elle me fait pas. La robe est trop petite et c’est ta faute. » avait-elle hurlé, poussant le jeune homme contre le mur à l’instant même où il avait tenté de sortir de la salle. Il s’apprêta à répondre, ce pauvre petit garçon qui était fautif de tous les problèmes mondiaux. «
N’ose même pas parler Stanislas, parce que je vais te faire regretter d’être venu au monde. Toi et ton parfait sourire. Toi et tes questions qui n’arrêtent pas, sans que tu prennes cinq secondes de ta vie pour comprendre que j’ai pas envie d’aller passer les vacances avec papa. Parce que je lui parle plus et que je veux plus jamais lui parler. Parce qu’il va encore passer toutes les vacances à glorifier ses parfaits petits héritiers qui font leur première année à Poudlard ! Wow hein ! Plus de mille ans que des élèves entrent à Poudlard mais eux c’est important ! Et puis je devrais également les observer, tous les quatre, à se vomir de l’amour comme s’ils étaient bénis des dieux pendant que maman elle est dans une espèce d’asile comme si elle valait moins qu’un stupide chien. Parce que je sais pas si tu sais, mais ils ont enfin réussit à se débarrasser d’elle ! Ils ont dit aux médecins qu’elle était dangereuse pour elle-même et pour moi et qu’ils ne pouvaient pas courir le risque qu’elle me blesse. Mais elle est malade ma mère, c’est pas comme si elle était méchante, elle va juste pas bien ! Et puis après ce sera moi la prochaine ! Ils vont aussi se débarrasser de moi tu comprends ? Alors non, je ne vais pas chez moi pour Noël et j’ai seulement envie de tous les – Pourquoi cette foutu robe est trop petite ! Elle est moche, c’est ma taille, ça toujours été ma taille, et puis j’ai mal et puis j’ai envie de – aouch. » sa voix se brisa dans une plainte de douleur, laissant son corps glisser le long du mur de la salle d’essayage, entourant son ventre de ses bras. «
SORS. »
Il restait droit. Il restait droit et stoïque. Le prince était sans mots, le prince était silencieux. Il se laissa glisser à son tour contre le mur, farfouillant dans l’une des poches de son manteau pour en sortir une petite flasque qu’il ouvrait dans son mutisme. Il haussa simplement les épaules, tendant le contenant vers son amie. «
Et si … tu enlevais cette stupide robe et qu’on allait boire quelques verres sur le toit de l’école ? » avait-il finalement murmuré, souriant à son hochement de tête.
« Aussi étrange que cela puisse paraître, plus on connaît quelqu'un, plus ses contours deviennent flous, comme si le temps passé ensemble effaçait ce qui le distingue de vous. »
Liane Moriarty
Juillet 1997
Adrasteia & Stanislas : 18 ans
Septimus & Octavius : 14 ans
«
Bien entendu. Des notes impeccables dans toutes les matières. Adrasteia est une jeune femme extrêmement intelligente mais également futée. Elle a comprit rapidement que chaque chose avait son temps et qu’il fallait mieux parfois attendre le bon moment pour en tirer tous les avantages. Une vrai personnification des valeurs de sa maison. Salazar aurait été entièrement satisfait de savoir que les Serpentards comptaient parmi leurs rangs une jeune femme tel que ma fille ! »
Son père bombait le torse, gardant la tête haute tout en faisant les éloges d’une jeune fille qu’il avait si rarement côtoyé. Il était fier son père, parce que sa fille avait reçu plusieurs mentions de la part de ses professeurs. Il était fier son père, parce qu’il pouvait faire le coq devant ses amis en leurs expliquant combien il était si heureux d’avoir des enfants aussi talentueux pour représenter non seulement sa descendance mais également les terres de sa patrie. «
Vous avez toutes les raisons d’être comblé mon cher Konstantin! Je suis persuadé que nous arriverons à une entente qui nous conviendra à tous. Nul n’est mon intention de vous arracher votre si talentueuse enfant. Une fois que tout sera réglé, vous pourrez visiter votre fille à votre guise. Je suis heureux de cette union, Adrasteia est une jeune femme si intrigante et séduisante. Une fois nos deux familles liées, je vous garanti que rien ne sera à notre épreuve ! Notre mariage sera si gargantuesque qu’ils en parleront encore dans deux siècles ! » avait répondu l’homme qui leurs faisaient face. La jeune femme hocha silencieusement sa tête, l’esquisse d’un sourire étirant amèrement ses lèvres qui pâlissaient à vue d’œil sous les rires gras des deux hommes qui lui faisaient face. Il avait tout prévu le salaud. Jusqu’à lui dévoiler la grande nouvelle en pleine réception devant l’homme qui serait, semblait-il, celui qui partagerait prochainement sa vie. Il avait tout prévu, dans les moindres détails, de la date de l’annonce de leurs fiançailles jusqu’à celle où elle emménagerait dans sa prochaine demeure pour s’habituer le plus rapidement possible à cette magnifique vie qui lui était destinée. Fatalité, une fatale destination qui scellerait son sort, que dis-je, son conte de fée. «
Je suis heureuse de pouvoir enfin vous rencontrer … papa m’a si souvent parlé de vous en bien. Toutefois si vous le voulez bien … j’aimerais aller féliciter quelques camarades une dernière fois avant que l’on débute enfin nos vies d’adulte. Nous pourrions nous revoir au courant de la semaine pour un repas tous ensembles et célébrer nos fiançailles dans l’intimité. J’aimerais ne pas voler la vedette aux finissants qui ont travaillés si durement depuis sept longues années ! » avait-elle calmement dit, remerciant son père qui lui donnait son approbation sous les compliments de l’homme quant à sa modestie. La jeune femme pivota sur elle-même, se mêlant aux nouvellement gradués qui débordaient d’une joie électrisante. Ses lèvres se pincèrent dans une colère qu’elle peinait à contenir, les ongles de ses doigts s’acharnant frénétiquement sur la peau de son avant bras, ses yeux recherchant anxieusement cette tête brune qu’elle avait vu quelques minutes plutôt. Il était quelque part, il devait forcément être quelque part. Elle attrapa deux flutes sur le plateau d’un serveur qui faisait de son mieux pour servir les invités, vidant rapidement les deux récipients de cristaux qu’elle déposa sur le plateau d’un second serveur. Le souffle court la jeune femme avançait péniblement parmi la foule festive qui encombrait la salle de leurs rires tantôt hypocrites, tantôt niais. Si on écoutait attentivement, on pouvait parfaitement se laisser avaler par cette spirale d’émotions qui se percutaient les unes aux autres, des glorifications aux vantardises, des félicitations aux consolations, des aveux dramatiques aux confessions attendrissantes jusqu’aux promesses futiles mais courtoises de toujours garder contact même si ils n’avaient même pas réussit à entretenir une simple relation durant sept années dans la même école. Et elle se percutait autant aux émotions qu’aux protagonistes. Parce que tout était flou, tout était vaporeux et pourtant tout était imposant, tout était oppressant. Un tout aussi sidéral qu’abyssal dans un trop qui l’écrasait avec fureur et accablement. Un tout qui lui rappelait ce rien qu’elle était, un rien qu’elle était qui exploserait rapidement sur tout. Son souffle se coupa, attrapant distraitement deux bouteilles de champagne qui trônaient sur une table quelconque. Quelconque, tout comme elle, tout comme tout. Hoquetant sous la surprise, la russe se retourna pour observer l’individu qui venait de lui toucher l’épaule, son expression figée par la sensation de pouvoir sentir l’entièreté de son individualisme péricliter dans une réalité dont elle ne comprenait pas le sens. Le jeune homme haussa un sourcil, prononçant son prénom avec curiosité, faisant finalement sortir la Raventhrone de ses songes. Elle lui offrit un sourire complice, inclinant la tête dans une invitation silencieuse alors qu’elle lui montrait les deux bouteilles qui ornaient ses mains. Pivotant sur elle-même pour se diriger hors de la salle de bal, recherchant distraitement une pièce suffisamment loin pour lui assurer qu’ils ne seraient pas dérangés. Son visage se détendit finalement, découvrant un petit bureau de travail à peine meublé. On pouvait parfaitement comprendre d’un simple coup d’œil qu’il n’avait pas été occupé depuis un long moment déjà.
«
Je constate que vous êtes assez festive pour revêtir vos couleurs de criminelle ! Avez-vous aussi l’intention de me dérober mon portefeuille ou bien vous limiterez-vous à votre expertise quant au vol de ces bouteilles, mademoiselle Raventhrone ? » - Il était facétieux et irrécupérable, son sourire charmeur illuminant son visage alors qu’il ouvrait les dites bouteilles dans un pop sonore. Elle s’approcha de son interlocuteur, s’appropriant une bouteille qu’elle porta à ses lèvres émerillonnées pour en boire une longue gorgée. Son index levé vers le ciel, la jeune femme lui indiqua de patienter quelques secondes, poursuivant les vils accusations de l’héritier Karkaroff. «
Que puis-je dire mon cher, j’étais pourtant persuadée que vous me connaissiez suffisamment pour savoir que votre portefeuille est bien loin d’être mon objectif principal quant à l’interminable liste de tout ce dont je convoite à vous subtiliser. J’oserais même dire que pour ce dont j’en sais, un homme aussi chimérique que vous m’inspire d’avantage l’envie d’explorer de nouveaux domaines dans la criminalité. À savoir, j’ai toujours été curieuse de tester les limites d’endurance d’un homme bulgare. À ce qu’il paraît vous avez la réputation d’être aussi sensible qu’une brique. » avait-elle dit d’une voix enjolivée d’espièglerie avant de boire une nouvelle fois ce qui semblait être suffisant pour apaiser un assoiffé. Elle leva finalement la bouteille de sa main droite, comme si elle trinquait son accomplissement avec la lune elle-même, pointant le bulgare de sa main libre, haussant un sourcil d’un air à la fois défiant et mièvre. «
Mais dites-moi, avant que je vous donnes l’honneur d’être la première victime de mes légendaires inepties les plus machiavéliques, comment vous sentez-vous d’avoir enfin la obtenu ce bout de papier relatant vos royaux exploits des sept dernières années de votre vie ? Je suis persuadé que votre mère fera des miracles pour harmoniser la nouvelle décoration du salon des invités en conséquence de votre diplôme qui trônera sur le mur à la place des glorieuses peintures qui encombraient le haut du foyer. De toute façon, à quelques années près du prochain siècle, qui donc porte encore de l’importance à orner ses murs d’œuvres aussi prosaïque que celles de Léonard de Vinci !? » avait-elle clamé d’une voix excessivement hautaine qui accentuait ses airs mélodramatiques. La jeune femme vint finalement prendre place sur le bureau en bois d’ébène, réajustant subrepticement le bas de sa robe qui avait remonté suite aux mouvements. Le plus jeune vint instinctivement prendre place à ses côtés, affichant toujours et encore ces airs souverains qui se complémentaient si parfaitement à cette opulente stoïcité qui se personnifiait même jusque dans l’ossature de son visage. «
Les rumeurs racontent que Léonard aimait batifoler dans sa propre équipe … Mais que cela reste entre nous, il me semble avoir effectivement vu ma mère discuter avec un styliste. Je m’avance peut-être un peu, mais je crois qu’ils ont déterminé les couleurs du mobilier en s’inspirant de celle de mes yeux. » - Son ton était humble, comme si finalement ses propos étaient d’une logique aussi imparable que l’évidence même.
Il hocha finalement la tête, son regard se focalisant sur un point autant lointain qu’imaginaire. Terminer les études c’était un peu comme d’accepter une maladie incurable. Au fond, même s’il était naturel et glorifiant d’en arriver à la fin, ils savaient tous les deux que ce nouveau chapitre venait avec des responsabilités et des attentes à combler tôt ou tard. Les choses changeraient, ils changeraient et cette fois ils devraient inévitablement marcher seuls sur leurs fils de fer respectifs. La brune hocha sa tête à son tour, neurasthénique devant l’accablante réalité qui se présentait à eux, sous la forme de ce même point éloigné et fallacieux. Ils seraient toujours là, mais ça ne serait plus jamais pareil. Ils seraient toujours présent, mais jamais assez pour apaiser cette dépendance. Elle haussa mollement les épaules, inspirant longuement avant de percuter sa bouteille de la sienne dans une trinquée désinvolte qui exprimait bien l’avanie qui lui persécutait l’âme depuis si longtemps face à l’hégémonie d’aristocrates prétentieux. Elle ingurgita une nouvelle marée, tentative désespéré de noyer ces tourments beaucoup trop grands pour ne pas lui éclater le crâne à trop vouloir se multiplier.
«
Je suis tétanisée. »
«
Je sais. »
«
Ce n’est pas juste. »
«
Je sais. »
«
Ce n’est pas obligatoirement la seule et unique fin Stanislas. Nous ne sommes pas des animaux par la barbe de Merlin ! »
«
Mais qu’est-ce que tu racontes … Ce n’est pas la fin. Il n’y aura jamais de fin, ne sois pas idiote. Nous ne sommes pas dans le couloir de la mort … tu es beaucoup trop dramatique. »
«
C’est exactement la meme chose Stan! Mieux vaut régner dans les enfers que de servir dans les cieux, tu vois John Milton avait déjà comprit ce genre de chose en 1667. »
«
Adra … mais qu’est-ce que tu racontes encore ? Combiens de verres as-tu consommés ce soir ? Où veux-tu en venir au juste avec tes histoires ! »
«
Me fais-tu confiance ? »
«
Parce que tu doutes ? »
«
La confiance absolue Stan, la dévotion, je parle d’un abandon total entre mes mains. Pourrais-tu mourir pour moi ? Pourrais-tu tuer pour moi ? Est-ce que tu remuerais terres et mers si je te le demandais ? Tu partages déjà mes peines et mes douleurs, mais pourrais-tu dévaster le monde pour venger mes pleurs ? Pourrais-tu condamner ton âme si c’était la seule solution pour me garder vivante ? » avait-elle dit d’un seul souffle, se laissant glisser du bureau pour retrouver le sol sous ses pieds, venant se placer entre ses cuisses. Elle posa ses mains contre son torse, glissant ses mains pour attraper le col de sa chemise tandis qu’un rire cristallin s’échappait de ses lèvres, son visage abordant maintenant des airs malicieux qui contrastaient au désespoir qui venait à peine de voiler le timbre de sa voix. Leurs rires délirants emplirent rapidement la petite salle alors qu’il posait son front contre le sien dans cette complicité désaxée qui leurs était propre. «
Dis-moi honnêtement … moy gadyuki … as-tu en tête le nombre précis de tous les gens que je devrai assassiner pour ton bonheur ? Parce que je dois me préparer adéquatement. » avait-il murmuré entre quelques rires espiègles avant de reculer sa tête pour la regarder un peu plus sérieusement. Elle baissa les yeux alors que ses joues se teintaient d’innombrables couleurs pourpres et qu’elle haussait les épaules, se concentrant à détailler l’encre qui décorait la peau lunaire de son cou. Ses lèvres se tordaient dans une moue partagée, se balançait faiblement sur la musique de la réception qui parvenait difficilement jusqu’à eux. La brune se pencha rapidement vers la droite, prenant entièrement appui sur Stanislas, vidant les dernières gorgées de sa bouteille qui trônait sagement à l’endroit où elle était assise quelques minutes plus tôt. Elle se redressa finalement, reportant son regard sur le bulgare, levant un index pour lui demander de patienter. Elle inspira longuement et expira avec force juste avant de poser ses lèvres contre les siennes. Et si le temps n’avait jamais été une notion pour situer le passé mais bien pour déterminer précisément quels étaient les bons moments ? Et si la vie comme ils la connaissaient n’avait jamais été autrement qu’une histoire que l’on racontait à des enfants pour leurs procurer de doux rêves ? N’avait-elle donc pas l’opportunité d’avoir sa propre fin à elle ? Une jolie fin qui ouvrait les portes à des milliers de possibilités poursuivant précieusement les traditionnelles paroles d’ils vécurent heureux jusqu’à la fin des temps. Haletante elle se sépara finalement de ses lèvres, cherchant instinctivement la prunelle de ses yeux aux couleurs océaniques. Pouvait-il seulement comprendre le paroxysme de cette peur qui lui déchirait les parois de son cœur ? Pouvait-il seulement imaginer les proportions démesurées de cette anxiété qui étranglait son âme ? Elle releva son menton dans une fierté qui lui faisait défaut, dans un courage qui tremblait de terreur. Elle aurait une fin, peu importe ce qui s’en suivrait, elle aurait sa propre fin. «
Épouse-moi. » avait-elle douloureusement soufflé, fixant ce même point lointain et imaginaire qu’ils avaient découvert un peu plus tôt. Elle patienta quelques secondes, retenant son souffle par nervosité, frappant faiblement son torse de son petit poing. Elle pressa ses lèvres pour retenir ce souffle qu’elle gardait malgré tout dans ces poumons qui manifestaient déjà leur besoin d’oxygène. Elle frappa une nouvelle fois, puis une troisième fois avec beaucoup plus de force. Avait-il seulement prit le temps de comprendre la gravité des conséquences que sa décision engendrerait ? «
Cette bouteille était définitivement de trop. »
Elle secoua sa tête vigoureusement à ses paroles. Il ne la prenait pas au sérieux, il n’avait pas prit ce temps nécessaire pour bien comprendre. Elle soupira longuement, un faible sourire étirant ses lèvres dans une supplique qui se fondait au désespoir tandis qu’elle détaillait les traits de son visage du bout de ses doigts. «
Arrête … n’agis pas comme si j’avais perdu l’esprit … peut-être devrais-tu boire davantage si c’est pour que tu sois aussi lucide que je le suis. » avait-elle soufflé. Il était si calme, comment pouvait-il être si calme alors qu’elle pouvait ressentir chaque battement affolé de son cœur. «
Je crains de n'être déjà engagé auprès de demoiselle Honoria Rosier. » - Son souffle se coupa au même instant qu’une décharge lui avait comprimé la poitrine. Lui refusait-il ? Était-ce vraiment ce qui arrivait ? Un rire nerveux secoua ses épaules tandis qu’une myriade d’émotions se peignait sur son visage. Ses paroles se répétaient éternellement au creux de son crâne. Si formel, si détaché … comme si elle n’était qu’une simple connaissance. Je crains, Il craint. «
Et alors ? Elle est jeune, elle arrivera facilement à trouver quelqu’un qui lui sied beaucoup mieux que – Tu peux me choisir … tu peux – Je le fais moi. C’est toi que je choisis, c’est toi qui. Tu sais que c’est beaucoup plus logique que nous – Pourquoi tu t’obstines à nous détruire … pourquoi accepte tu cette fin? » - Et de ses discours décousus elle peinait à lire ce visage qu’elle connaissait par cœur. «
Cet engagement n'est pas une fin en soi, Adrasteia. » avait-il tenté de lui faire comprendre. Seulement c’était lui qui ne comprenait rien. «
Tu ne devrais pas craindre ma décision. Pas si tu comprenais que nous sommes unis d'un lien plus profond que le mariage. » avait-il continuer de cette voix qui lui était inconnue, de cette voix aux paroles qui lui provoqua un rire amer. Comment pouvait-il encore oser lui dire de si belles paroles. «
Mon pauvre Stanislas, la seule et unique chose à comprendre dans cette histoire réside dans ces doux mensonges que tu pestes toujours et encore à mes oreilles. Suis-je si sotte à tes yeux ? » avait-elle fulminer avant de se reculer, ses gestes tremblants d’émotions qui se heurtaient les une aux autres. Il attrapa son poignet, l’empêchant d’augmenter la distance qui se creusait déjà trop profondément entre eux, l’attirant à lui avec une autorité qui se trahissait d’affections. «
Mon allégeance va à mon devoir d'héritier. A l'honneur de ma famille. J'ai accepté ces responsabilités. Et j'en assumerais les conséquences. » avait-il amèrement dit, lui l’inconnu qui possédait le corps du seul homme qu’elle avait louangé toute sa vie. Elle l’observa tétanisée, prenant quelques secondes pour s’assurer des paroles qui venaient une nouvelle fois de fendre son âme. Ce n’est qu’à la première larme qui foula la peau de sa joue qu’elle sortit enfin de sa torpeur, sa main giflant le bulgare avec force. Il ne broncha pas, il ne pouvait pas broncher. «
Et je ne suis pas suffisante Karkaroff ? Je ne suis pas suffisante pour l’honneur de ta famille ? Je t’ai accompagné dans tes pires cauchemars jusqu’aux plus futiles de tes soupires et tout ce que je mérite c’est de te regarder sagement lui donner ce qui m’appartient ? Tout ce que je mérite c’est de continuer à te soutenir dans ta vie d’honorable héritier sous principe que je devrais me contenter de savoir que tes sentiments sont secrètement miens ? Lui diras-tu ? Lui diras-tu, que pour l’honneur de ta famille, tu me laisse mourir dans les bras d’un vieil homme ? Ou peut-être devrais-je lui dire ? Combien elle doit remercier le ciel de lui avoir donné un homme aussi courageux que toi ? Parce que tu assumes les conséquences de tes responsabilités au dépit de toutes nos promesses. » avait-elle dit sous l’emprise de cette haine qui s’installait confortablement sur les miettes de son cœur.
Un long silence perça l’air déjà lourde de la salle. Il ne broncha pas, il n’avait pas le droit, pas après les mélodies aux notes traitresses qu’il venait de jouer. Il l’avait choisi,
elle. Il l’avait trahi,
elle, détruisant quinze années de dévotions d’un simple battement de cils. Le roi de tout, le roi de rien qui assumerait les conséquences. Une plainte venimeuse s’échappa de sa gorge alors qu’elle le poussait de ses mains contre son torse dans une provocation précaire. Le roi stoïque bougea à peine, un sourire demandant l’amnistie étirant difficilement ses lèvres, levant sa main gauche pour replacer tendrement une mèche de ses longs cheveux d’ébène derrière son oreille ornées de boucles scintillantes d’une collaboration entre leurs deux familles. «
L’anneau est à mon doigt, et la couronne à mon front. Une profusion de satins et de joyaux est à mes ordres. Et je suis heureux. » avait-il cité, provoquant en elle un chamboulement frôlant l’hystérie. Elle le poussa une nouvelle fois, avec toutes ses forces avant d’abattre une pluie de poings contre son torse qu’il intercepta d’une seule main. Les poignets liés sous son emprise, elle avait posé son front contre le siens, le suppliant à mainte reprises de la choisir entre quelques sanglots qui secouaient son corps engourdit par l’alcool. Frustrée par ses pathétiques émotions et par l’entêtement du plus jeune, la brune poussa un grognement avant de capturer une nouvelle fois ses lèvres, écourtant rapidement le baiser par la force de cette morsure qu’elle prodigua sur la lèvre inferieur du brun qui ne broncha pas, si ce n’était que d’un soupire qu’il venait de pousser. «
Je t'ai déjà dit que rien ne se mettrait jamais entre nous. Rien. » - «
Stanislas Caïus Karkaroff, écoutes bien ces paroles. Tu es et restera à tout jamais le seul ‘’rien’’ qui creuse cette fausse entre nous et saches que c’est dans cette même fausse que nous allons crever ensemble. » avait-elle rétorquée au tac-au-tac. Elle inspira longuement, l’iris de ses yeux s’assombrissant au gré de son menton qu’elle leva haut. S’il avait pu déchiffrer la tempête d’émotions qui avaient déchiré son visage, alors il pouvait parfaitement discerner la détermination qui y prenait désormais place. Sa fin, elle voulait sa fin et personne ne voulait la lui donner. Elle tourna son visage, fixant avec obstination ce point lointain qui riait en la pointant du doigt. Reine de fureur, reine vengeresse. «
Que cette parole soit le signal de notre séparation, oiseau ou démon ! — hurlai-je en me redressant. — Rentre dans la tempête, retourne au rivage de la Nuit plutonienne ; ne laisse pas ici une seule plume noire comme souvenir du mensonge que ton âme a proféré ; laisse ma solitude inviolée ; quitte ce buste au-dessus de ma porte ; arrache ton bec de mon cœur et précipite ton spectre loin de ma porte ! Le corbeau dit : jamais plus. » avait-elle citée à son tours dans un murmure assez doux pour rassurer son âme avant de poursuivre. «
Ceci est donc un au revoir. » - Petite peste aux paroles tranchantes qui se consumait dans sa propre révolte.
Cette fois il broncha, la colère contractant les muscles de son visage, ses mains se resserrant contre les poignets qu’il tenait encore. «
C'est cela. Pars et épargne-moi de te voir partir avec lui. » avait-il pesté entre ses dents. «
Bien entendu mon roi. Vous savez parfaitement que je serai toujours prête à parcourir les sept enfers pour m’assurer que vous pourrez honorablement remplir vos royales obligations. » - Le roi stoïque s’agaçait, impuissant à la croisée des chemins. De sa main libre il entoura la peau basanée de son cou, enfonçant tendrement ses doigts dans sa chaire, l’attirant encore à lui. «
Tu peux t'enfuir, tu peux courir. Mais tu ne peux pas m'échapper. Pas à moi, moya kukla. » - son timbre était tendrement bouleversé entre ses peines et convictions, profanant éternellement le concept de l’amour par des menaces revêtant savamment des aires de promesses. Il avait mal, elle le savait. Il n’abandonnerait pas et c’était imparfaitement parfait ainsi. Elle posa enfin son regard sur lui, plantant ses iris aux pupilles dilatées par la mortification avant de lui voler un dernier baiser. Ses ongles s’enfonçant rageusement sur la peau de sa mâchoire parfaitement définie tandis qu’elle exprimait ses malédictions contre ses lèvres. À bout de souffle elle se sépara de lui à contrecœur, ses yeux aux couleurs d’acier perforant les siens d’une douceur venimeuse avant de citer ces paroles qui résonnaient toujours et encore dans son crâne. «
J’en assumerai les conséquences. » avait-elle soufflé dans le plus faible des murmures, s’écartant définitivement de son double qu’elle quittait pour trouver sa propre fin.
« Le choix ultime pour un homme, pour autant qu’il lui soit donner de se transcender, est … créer, ou détruire… aimer, ou haïr »
Erich Fromm
Décembre 1999
Adrasteia : 21 ans / Septimus & Octavius : 17 ans
Ses yeux relisaient pour la millième fois cette missive qu’elle avait reçut quelques jours plutôt. Elle restait de marbre, cette flegmatique jeune femme aux plûmes d’ébène qui ressemblait de plus en plus à cette mère qui pourrissait dans une chambre aux décors d’un blanc épuré. Elle se faisait violence, simplement parce qu’il n’était pas le temps de se laisser aller à ses émotions. Elle avait peur, elle avait toujours eu peur, ses yeux fixant l’encre qui se détaillait en de fines lettres sur le parchemin.
C’est avec le plus grand regret que je t’écris ces mots, ma chère enfant. Je sais parfaitement que la situation avec ton père n’a jamais été des plus faciles, mais j’espère sincèrement que tu trouveras la force de mettre de coté vos querelles en ce sombre jour. Konstantin et Viktoriya ont malheureusement été retrouvés sans vie la nuit dernière. Sans trop pouvoir m’avancer dans les détails, la supposition d’un meurtre semble être une piste. Si tu le souhaites, je peux t’accompagner à la cérémonie pour l’enterrement de ton père, je t’attendrai à ma demeure dès demain. Saches, ma chère et précieuse Adrasteia, que je te supporterai quoi qu’il arrive.
Je t’embrasse affectueusement dans l’espoir de voir ton doux visage prochainement,
Laurentius Cyprian Raventhrone
La brune hocha sa tête, froissant la missive entre ses mains avant de la jeter contre le sol, une main se posant chaleureusement contre sa cuisse. Elle observa l’homme qui se tenait droit dans toute sa puissance, le remerciant silencieusement en entre lassant ses doigts aux siens. Il avait toujours été présent, toujours été pertinent. Beaucoup plus un père qu’un parrain, toujours plus un père qu’un oncle. Et s’il l’avait toujours supporté avec obstination devant ses paires, il n’avait jamais hésité à lui pointer ses fautes et ses erreurs avec sagacité. Simplement parce qu’il reconnaissait ses capacités et n’acceptait pas l’injustice qui l’avait poursuivit toute sa vie. Sa nièce était forte, sa nièce était ambitieuse et elle ne se résumerait pas à diriger un manoir pour payer le prix des déloyautés de son père. C’est pourquoi il l’avait soutenu lorsqu’elle avait quitté les terres de la Grande-Bretagne. C’est pourquoi il avait subvenue à ses dépenses lorsqu’elle avait prit la fuite lorsqu’ils avaient tenté de lui glisser la bague au doigt. Deux ans à parcourir le monde. Deux ans à examiner tout ce que la terre pouvait lui offrir pour assouvir cette soif de connaissance qui l’avait toujours animée. Deux ans à frémir de cette réalité qui confondait les sorciers aux moldus dont elle avait toujours été protégée. Et pourtant elle ne regrettait rien, ni la solitude, ni l’impuissance qui l’avaient accompagnées tout au long de son périple. Au fond, rien ne pouvait égaler cette puissance qu’elle avait trouvée en découvrant l’étendue de cette magie qui définissait sa raison d’être. Elle apprendrait, jusqu’à son dernier souffle elle apprendrait cette nouvelle magie qui avait consumé avec convoitise la plus délicate de ses cellules, en dansant voluptueusement de ses flammes lucifériennes. La pression sur ses doigts se fit soudainement plus présente, sortant la brune de ses songes. Un homme lui demanda de venir prendre place dans la salle, refermant la porte derrière eux avec discrétion. Un silence lourd se fit empereur de la pièce, ses demi-frères l’observant avec stupéfaction, sans comprendre la moindre chose. «
Septimus, Octavius. » avait-elle calmement saluée d’une voix chaleureuse. Septimus se redressa, fronçant les sourcils avec méfiance quant à l’absurdité de la situation. Octavius quant à lui, lui retourna sa salutation avec courtoisie, démontrant toute sa sagesse. Il avait toujours été son préféré. Parce qu’il ne ressemblait en rien à son père. Parce qu’il avait toujours accepté cette haine qu’elle leur vouait en lui donnant raison. Ils vinrent prendre place à la table, immobile et statuaire tandis que le notaire déposait les derniers dossiers devant lui, débutant la lecture du testament. À sa plus grande surprise, son père ne l’avait pas renié, ni elle, ni sa mère, s’assurant qu’une somme soit versée chaque mois pour payer les frais de ses soins. Une pointe de honte vint se planter vivement sur son cœur qu’elle chassa rapidement en reportant son attention sur le notaire. «
Maintenant, pour ce qui est de la succession de l’UkRa … Monsieur Raventhrone léguait l’entièreté des droits aux noms de Septimus et Octavius. Toutefois, comme vous êtes toujours aux études, votre père avait désigné votre oncle Cyrillus comme successeur datif pour diriger la compagnie si une situation comme celle-ci se présentait- » - «
Attendez une seconde … pourquoi avez-vous employé le terme ‘’ léguait’’ ? » avait grossièrement coupé Septimus. Son frère leva une main à son encontre, lui intimant silencieusement de se calmer.
L’homme se raclait maladroitement la gorge, baissant les yeux pour regarder tous les documents qu’il avait sous les yeux. «
Parce que cette clause entre en conflit avec des papiers que possédait monsieur Laurentius. » - Il nota une pause, poussant un soupire exprimant sa désolation mais également son impuissance. «
Il se trouve que nombreuses familles s’adonnent à des alliances pour en tirer un quelconque avantage. Lorsqu’ils officialisent l’alliance, certaines familles sont assez futées pour introduire des conditions, comme ce fut le cas pour vos grands-parents. De ce fait, le contrat concernant le mariage entre votre père et la mère d’Adrasteia comportait une close contraignante à un divorce. Si Konstantin était l’instigateur d’un divorce, la totalité de ses avoirs concernant l’UkRa se partagerait avec les enfants qu’il aurait avec Madame Valeriya von Lazar. Puisque Mademoiselle Raventhrone est la seule descendante de cette lignée, elle est donc la seule à profiter de cet héritage. Malheureusement, même si le testament de votre père est parfaitement en règle, ses dernières volontés ne peuvent pas outrepasser cet accord. Je ne peux rien y faire. » Le silence s’imposa une nouvelle fois, Septimus se laissant lentement avaler par la chaise dans laquelle il prenait place, son visage se décomposant alors qu’il comprenait finalement la réelle raison de la présence de sa sœur et son oncle. Son poing se frappa violemment contre la table, pestant sa colère contre l’idiotie de son père. L’homme se tourna vers elle, faisant abstraction du comportement irascible de Septimus. «
J’aimerais que l’on règle immédiatement cette partie si vous le voulez bien ? »
Adrasteia hocha calmement la tête, inspirant longuement pour se donner la force de prendre la parole. Elle, la peste à la langue acerbe qui avait passé un peu plus de deux décennies à survivre par la peur. Elle, la reine sans peuple qui avait passé sa vie à se consumer sous ses craintes, était maintenant celle qui détenait ce pouvoir qu’elle avait jalousé. Le dos droit et la tête haute, elle avait sourit furtivement à son oncle avant de prendre la parole. «
J’accepte l’héritage qui me revient de droit … et je vous suis reconnaissante pour toutes ces années de loyauté avec mon père, qui n’était certes pas un homme facile à suivre. Toutefois, il m’est présentement impossible d’assurer mes responsabilités puisque je compte intégrer l’UPA en septembre prochain. C’est pourquoi j’aimerais désigner Laurencius, ici présent, comme successeur datif. Mon oncle travaille depuis aussi longtemps que Konstantin et a fait à nombreuse reprises ses preuves quant à ses qualités pour diriger la compagnie en l’absence de mon père lorsqu’il élargissait son territoire. J’aimerais le remercier pour toute sa dévotion ainsi que son soutient … par conséquent il restera le dirigeant officiel de l’UkRa jusqu’à ce qu’il en décide autrement. Quant à Septimus et Octavius, j’aimerais offrir une proposition qui je pense être juste. Puisqu’ils ne sont pas volontairement responsable de toute cette situation qui les importune, j’aimerais leurs offrir une place pour siéger à la direction de l’UkRa. Bien entendu, cette fleur est offerte sous certaines conditions. Par conséquent, ils devront obtenir leurs diplômes à Poudlard, mais également poursuivre et compléter des études supérieures à l’UPA en septembre prochain. Ces diplômes devront évidemment être pertinents pour l’UkRa et j’en vérifierai moi-même leurs parcours scolaire. Cyrillus s’occupera par la suite de leur apprendre tout ce qui est nécessaire quant à la direction de la compagnie. Quant à moi, j’assisterai Laurentius au niveau des relations et des développements, dès février jusqu’à septembre. Nous verrons la suite à ce moment là. Je vous remercie monsieur pour votre patience, mais je suis actuellement attendue ailleurs. » avait-elle déclaré, se redressant automatiquement pour quitter la table, accompagné de son oncle. Elle s’enfonça dans le couloir, faisant fi des insultes que lui lançait Septimus même après avoir refermé la porte de la salle. La brune se laissa reposer contre le mur, soupirant avec soulagement tandis que son oncle déposait un tendre baiser contre son front. «
Tu étais parfaite. Je suis fier de tes décisions et de tes choix Adrasteia. C’était la bonne chose à faire. » avait-il murmuré avant de lui faire un signe de la tête, l’intimant à le suivre. «
Allez, partons, ce n’est pas encore terminé. »
« Des plus profond désir, naissent souvent les haines les plus mortelles. »
Socrate